Comment tuer le parasite de la malaria (paludisme) en le rendant obèse ?

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le  5 mai 2023
© Dr Cyrille Botté
© Dr Cyrille Botté
La malaria est causée par un parasite qui doit envahir le globule rouge humain pour s’y développer et se reproduire. Sa survie dépend du contrôle des ressources lipidiques détournées depuis l’hôte humain. Pour y parvenir, le parasite déploie un arsenal moléculaire qui lui permet de découper les lipides de l’hôte. Dans une étude publiée dans la revue Cell Reports, une équipe de recherche impliquant des scientifiques de l'Institut pour l’avancée des biosciences (IAB - CNRS/Inserm/UGA) ont réussi à identifier l’enzyme responsable de ce mécanisme ainsi que des molécules candidats médicaments permettant de bloquer ce processus et tuer le parasite.
Le parasite du paludisme ou malaria appartient au groupe des Apicomplexa, organismes unicellulaires, responsables de maladies infectieuses majeures chez l’homme et le bétail. Chaque année, celui-ci infecte plusieurs centaines de millions de personnes et cause la mort de plus d’un demi million d’entre elles. L’éradication de la malaria constitue une des priorités mondiales d’autant que la propagation et la mortalité de la maladie se sont fortement aggravées dans le contexte de la crise sanitaire suite au Covid-19 et du réchauffement climatique. Le développement de nouvelles approches thérapeutiques passe par une meilleure connaissance des interactions entre le parasite et son hôte. Dans une récente publication dans la revue Cell Reports, les scientifiques viennent d’identifier un des acteurs principal du processus infectieux : une protéine parasitaire appelée lysophospholipase (PfLPL3) que le parasite envoie au contact des membranes du globule rouge pour y « découper » les lipides détournés par le parasite puis les stocker et les utiliser au moment de sa division. De nouvelles approches d’analyses des flux lipidiques par spectrométrie de masse de microscopies de pointe ont mis en évidence que l’inactivation de cette enzyme induit une rapide dérégulation du métabolisme lipidique du parasite et sa mort. 

À la recherche d’éventuels inhibiteurs de cette enzyme qui pourraient ainsi tuer et donc théoriquement traiter les globules rouges infectés, les scientifiques ont découvert deux molécules bloquant spécifiquement la lysopholipase3 et donc capables de tuer et éradiquer la présence parasite in vitro. Cette nouvelle étude a donc permis de valider ces molécules en tant que nouveaux candidats médicaments, mais également des outils pour la recherche sur la malaria. Ceux-ci sont actuellement en cours de développement. 

Rôle de la proteine Lysophospholipase3 (LPL3) chez l’agent de la malaria humaine
© Dr Cyrille Botté, article publié sous licence Creative

Figure : Rôle de la proteine Lysophospholipase3 (LPL3) chez l’agent de la malaria humaine, Plasmodium falciparum. (Panneau de gauche) : Une fois à l’intérieur du globule rouge humain, le parasite modifie la structure de l’hôte. Elle y envoie la protéine à l’interface hôte-parasite où LPL3 « digère » les lipides de l’hôte (Phospholipids) pour générer des acides gras (fatty acids). Ceux-ci sont ensuite stockés sous forme de lipides neutres de stockage (DAG,TAG) et mobilisés uniquement lors de la division parasitaire (schizogony) afin de permettre la propagation et la survie du parasite. (Panneau de droite) : Sans la protéine LPL3 ou après traitement avec les candidats-médicaments (PCB6 PCB7), le parasite n’est plus capable de digérer et stocker les lipides de l’hôte. Il n’est plus capable de fabriquer le matériel membranaire nécessaire pour sa division et meurt.
Publié le  5 mai 2023
Mis à jour le  5 mai 2023