Travailler avec des volumes en 3D peut s'avérer fastidieux, surtout avec les outils de bureautiques traditionnels (clavier, écran plat, souris). François Bérard a décidé de changer la donne en proposant une approche novatrice : l'utilisation d'un écran sphérique tenu entre les mains.

Inspiré par les travaux d'un chercheur de Toronto qui proposait un écran volumique sur un cube d’écrans LCD à cinq faces (la sixième servant à faire passer des câbles), François Bérard a perfectionné le concept pour donner naissance à La Sphère, beaucoup plus agile.

Concrètement, La Sphère est une boule de polystyrène équipée de marqueurs réfléchissants. Pour s’en servir, l'utilisateur porte des lunettes spéciales, similaires à celles utilisées pour la visualisation 3D au cinéma, et un capteur placé au bout de l’index également équipé de marqueurs réfléchissants et qui sert pour cliquer. Grâce à des caméras de suivi, tous les mouvements de la boule, des lunettes et du doigt sont détectés avec une extrême précision. Sous un projecteur, l'utilisateur peut alors manipuler des hologrammes en temps réel, comme par exemple ce jeu de briques à empiler développé pour l’expérimentation, en utilisant la sphère comme interface.

« Actuellement les outils utilisés par les experts en modélisation 3D sont beaucoup moins rapides et ergonomiques. Lors de notre expérimentation collaborative avec d’autres équipes de recherche, nous avons constaté qu’utiliser un joystick à une main dans l’espace est beaucoup moins précis que de tenir La Sphère à deux mains en étant assis », indique François Bérard. « De même, on a comparé l’utilisation de La Sphère avec un casque de réalité virtuelle et on a observé que les participants étaient 17% plus efficace en la manipulant. » précise-t-il.

Les atouts techniques de ce nouvel outil sont la projection calibrée et sa faible latence. Grâce à un système de suivi et de projection calibré avec une très grande précision, l’illusion de présence des objets virtuels dans la sphère est saisissante et les actions de l’utilisateur sont instantanément reflétées sur ces objets. Cette réactivité est essentielle pour garantir une expérience immersive, fluide et efficace.

Une expérimentation numérique en réseau

En lien avec un laboratoire de l’École nationale d’ingénieurs de Brest, François Bérard a également démontré la possibilité d'une interaction à distance, offrant ainsi de nouvelles perspectives pour la collaboration numérique. C’est d’ailleurs l’un des objectifs du programme de recherche pluridisciplinaire « Futur de la collaboration numérique » appelé eNSEMBLE. Ce projet, piloté par l’Université Grenoble Alpes, le CNRS, Inria et l’Université Paris-Saclay, est labellisé France 2030 et opéré pour le compte de l’État par l’Agence nationale de la recherche. Il a pour ambition d’inventer les outils collaboratifs numériques de demain ! Il mobilise près d’une centaine d’équipes d’informatique et de sciences humaines et sociales issues de plus de cinquante laboratoires en France et le projet La Sphère en fait partie.

Bien que La Sphère soit encore au stade d’expérimentation, son potentiel à révolutionner la manière dont nous concevons et manipulons la 3D est indéniable, ouvrant la voie à de nouvelles applications dans des domaines aussi variés que la conception industrielle, la modélisation architecturale, l’imagerie médicale et la réalité virtuelle.

Ce projet développé au sein du LIG, témoigne de l'engagement de l'Université Grenoble Alpes dans la recherche d'avant-garde en informatique et en interaction humain-machine.