La malbouffe et les perturbateurs endocriniens peuvent induire un syndrome proche du diabète chez les amphibiens

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le  12 septembre 2022
Grenouille verte - Shutterstock
Grenouille verte - Shutterstock
Le diabète de type 2 est une maladie métabolique particulièrement décrite chez l’homme et dont l’étiologie peut être attribuée à la sédentarité, la malbouffe et la pollution. Cependant cette maladie n’a jamais été décrite chez des espèces ectothermes comme les poissons ou les amphibiens. En étudiant des grenouilles vertes issues de fermes d’élevage nourries avec une alimentation riche en graisse et en comparant les effets de cette alimentation avec une exposition aux perturbateurs endocriniens, des chercheurs de l’Université Grenoble Alpes et du CNRS issus du Laboratoire d’Écologie Alpine (LECA - UGA/USMB/CNRS), l'un des laboratoires de la fédération OSUG, ont montré que les amphibiens peuvent développer un syndrome métabolique typique d’un diabète de type 2 et que ce syndrome peut être à la fois induit par la malbouffe et les perturbateurs endocriniens. Cette étude a été publiée dans la revue Environmental Pollution le 20 août 2022
Découvrez tous les épisodes de la série Last news from Science réalisée par l'Observatoire des Sciences de l'Univers de Grenoble (OSUG).
Au cours de ces dernières décennies, l’augmentation des activités humaines a entraîné l’exposition des populations animales à des milliers de polluants. Parmi les milieux aquatiques d’eau douce, les zones humides sont des écosystèmes complexes dans lesquels les xénobiotiques s’accumulent. Dans ces milieux, un déclin dramatique des populations d’amphibiens a été observé au niveau mondial depuis les années 80. Des études récentes menées à l’Université de Grenoble Alpes ont démontré chez une espèce modèle d’amphibien (Xenope tropicalis) que les perturbateurs endocriniens (PE) pouvaient induire un syndrome de pré-diabète pouvant constituer une cause potentielle du déclin des populations d'amphibiens. Cependant, de tels effets n'ont pas été constatés chez les grenouilles de type sauvage exposées aux PE et la capacité des amphibiens à développer physiologiquement un diabète de type 2, comme les mammifères, n'a jamais été démontrée.

Pour répondre à ces questions, les chercheurs du Laboratoire d’Écologie Alpine ont étudié des grenouilles vertes issues de ferme d’élevage (Souche Rivan92) dont la nourriture est enrichie en graisse (régime High fat) pour une croissance rapide et des grenouilles vertes sauvages exposées à différents PE.

Les résultats démontrent que les grenouilles Rivan92 nourries avec un régime riche en graisse présentent plusieurs caractéristiques d’un diabète de type 2 incluant un poids plus important, une augmentation de la masse grasse, une intolérance au glucose, une résistance à l'insuline et une stéatose hépatique non alcoolique (NAFLD).

Les grenouilles vertes exposées au PE modèle benzo[a]pyrène pendant 18 heures (10 µg/L) présente également plusieurs caractéristiques du phénotype de pré-diabète comme l'intolérance au glucose et la résistance à l'insuline.

L’exposition de ces mêmes grenouilles vertes à d’autres PE connus pour induire des syndromes métaboliques chez les mammifères entraine également une intolérance au glucose et démontre que les effets observés chez les mammifères sont similaires à ceux observés chez les grenouilles.

Ces résultats démontrent qu’un syndrome métabolique proche d’un diabète de type 2 peut être induit chez les amphibiens par un régime trop riche en graisse. Bien qu’un tel régime ne puisse exister dans la nature, ces résultats confirment que les troubles métaboliques induits par les PE chez les grenouilles vertes sauvages sont typiques du phénotype de pré-diabète et pourraient servir de point de départ à des études de terrain visant à déterminer le rôle des PE dans le déclin des populations d'amphibiens.

D'un point de vue environnemental, un simple test de tolérance au glucose pourrait être utilisé sur des grenouilles sauvages pour identifier les étendues d'eau pollués par des perturbateurs métaboliques susceptibles d'affecter la santé des espèces présentes y compris l’homme.
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Publié le  12 septembre 2022
Mis à jour le  13 septembre 2022