L'importance du détail dans la peinture écossaise de 1750 à 1850 : le cas de Raeburn et de Wilkie

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le  13 octobre 2017Saint-Martin-d'Hères - Domaine universitaire
L’école écossaise de peinture s’est formée au début du XIXe siècle, mais déjà durant la seconde moitié du XVIIIe siècle un art du portrait propre à l’Écosse s’était développé. Les premières toiles des portraitistes se caractérisaient par un traitement minutieux des détails. Ce souci de réalisme mimétique a valu à la peinture écossaise d’être comparée à la peinture hollandaise ainsi que le surnom de "l’école des moindres détails".
Ce séminaire a pour objectif d’étudier l’évolution du traitement du détail dans la peinture écossaise entre 1750 et 1850 à travers l’œuvre de Sir David Wilkie et Sir Henry Raeburn, qui furent deux des principaux représentants de l’école écossaise du XIXe siècle. Si pour Wilkie et Raeburn le détail permettait, selon l’expression de Barthes, de renforcer « l’effet de réel », ils ne l’ont pas traité de la même façon, le premier peignant des tableaux au réalisme mimétique et le second adoptant une approche faisant écho aux théories du penseur Thomas Reid.

La thématique retenue par le CEMRA pour le contrat quinquennal 2015-2020 est celle des "lieux de passage". C’est sur la base de cette notion que l’axe « Poésie » organise un séminaire sur la notion de « détail ». En effet, le détail est, par définition, ce sur quoi le regard passe sans y prêter vraiment attention, ce dont la conscience se désintéresse spontanément, ce qu'elle délaisse au profit du sens global, obvie, saisi de prime abord. Pourtant, si le détail peut être considéré comme l'insignifiant même, il peut aussi tenir un rôle central dans l'économie de l’œuvre poétique et picturale. De ce point de vue, ce « petit rien » devient, à bien y regarder, le point d'ancrage de la signifiance, l'espace faussement futile d'une émergence, la zone secrète de la sécrétion du sens où s'élabore une logique insistante donnant à l’œuvre toute sa densité. Ainsi le lièvre minuscule – presque imperceptible – détale-t-il devant la locomotive dévorante du célèbre tableau de Turner (Rain, Steam and Speed), alors que le faisan (cock-pheasant en anglais...) – dont une seule plume reste visible – s'absente mystérieusement des genoux de la castratrice Mrs Andrews dans la toile inachevée de Gainsborough (Mr and Mrs Andrews). Dans ces deux cas, loin d'être anecdotique, la valeur du détail est matricielle. De la même manière, et parmi de nombreux autres exemples, les chevilles enflées de Simon Lee – détail grossier mais extraordinairement grossi (voir les nombreuses répétitions) du poème éponyme de Wordsworth – délivrent l'essence même de l'esthétique du romantique, tandis que le vers ajouté par Tennyson à son sonnet « The Kraken » (vers lui-même excédentaire d'un pied) révèle la prégnance d'un désir indicible qui s'incarne dans la langue sous la forme d'une broutille métrico-linguistique. Abolis bibelots d'inanité sonore et visuelle (dira-t-on pour emprunter en l'adaptant sa belle formule à Mallarmé), ces détails informent ainsi les œuvres dont ils représentent peut-être la clé. Mettre au jour les implications historiques, esthétiques, philosophiques ou psychanalytiques des grandes œuvres poétiques et picturales du monde anglophone : telle sera l'ambition de ce séminaire au cours duquel, paradoxalement, l'insignifiant présidera à l'élaboration du sens.
Publié le  29 septembre 2017
Mis à jour le  29 septembre 2017