Jade Thiriat, Gameplay programmeuse

Formation
le  16 septembre 2019
Jade Thiriat
Jade Thiriat
Promotion Grenoble INP – Ensimag 2016, Jade est aujourd’hui Gameplay programmeuse et s’engage pour faire connaître aux jeunes filles le monde du jeu vidéo et ses métiers. Rencontre avec une jeune femme enthousiasmée par son métier qui allie créativité et technologie.

Bonjour, Jade peux-tu te présenter ?

Je suis développeuse chez Ubisoft. J’ai fait une prépa "classique" en PCSI* avant d’intégrer Grenoble INP – Ensimag, comme quoi c’est possible même quand on a fait physique / chimie ! Lors de ma 2e année d’école d’ingénieur, j’ai intégré le Master of Science in Informatics at Grenoble (MOSIG), un parcours commun avec l’Université Grenoble Alpes, nous avions des cours sur la graphique 3D et tout cela en anglais, avec un groupe multiculturel, c’était super !

J’avais choisi Grenoble INP - Ensimag notamment pour les partenariats qui existent avec le Japon car aller étudier là-bas était en effet un de mes objectifs depuis longtemps ! J’ai donc effectué une césure d’une année à Osaka. Nous avions des cours variés dans le cadre d’un projet d’échange culturel : sociologie, anthropologie, mythologie, histoire de l’art…

Ensuite lors de ma 3e année, en 2016, j’ai fait mon stage de fin d’études chez Ubisoft. Cela s’est très bien passé et j’ai eu un CDD de 6 mois dès la fin du stage. Aujourd’hui, je suis en CDI.

En quoi consiste ton job de Gameplay programmeuse ?

Au début, quand je suis arrivée chez Ubisoft, le jeu sur lequel je travaillais, Ghost Recon® Breakpoint, venait juste de sortir. Mon travail consistait alors essentiellement à "dé-bugger". Ensuite j’ai été rattachée à l'équipe Exposition du jeu, qui s'occupe de l'expérience utilisateur et des interfaces. Cela englobe à la fois les menus du jeu, les éléments de HUD, c'est à dire les éléments dans la vue 3D (comme les notifications par exemple, ou les marqueurs de quêtes), et l'accessibilité. Depuis, je suis avec la même équipe et nous avons fait la suite du jeu que nous avons codée en C++. Connaître ce langage est un pré-requis dans ce milieu.

Mon équipe est pluridisciplinaire, je travaille avec des artistes, des game designers, des testeurs… C’est très intéressant et très riche, surtout lorsqu’il s’agit d’intégrer les productions des artistes et de les restituer dans le jeu. Nous étions jusqu’à 800 personnes à travailler sur ce projet. Cela demande de la souplesse, surtout que nous ne sommes pas tous basés en France.

Quels sont les apports de ta formation dans ce métier ?

Après ma formation, j’avais quelques notions de C++, il a fallu que je m’adapte et que j’enrichisse ma technique. Mais grâce à ma formation, j’ai l’esprit logique et apprends très vite. J’ai aussi appris les bases de la modélisation et du rendu 3D, cela m’a permis d’être plus à l’aise avec cette technologie. Le point fort de ma formation d’ingénieure est d’avoir abordé plein de sujets différents, des manières d’approcher le code différemment, ce qui fait qu’aujourd’hui je m’adapte très vite. Grenoble INP – Ensimag nous donne beaucoup de bases, à nous ensuite d’aller plus en profondeur.

Que conseillerais-tu à des jeunes (femmes) qui rêvent de travailler dans le milieu du jeu vidéo ?

Il est utile de s’impliquer dans des projets en parallèle. Cela montre notre motivation et permet d’apprendre plein de choses, c’est vraiment valorisé par la suite. Avant de rejoindre Ubisoft, je me suis beaucoup entrainée sur CodInGame. Pendant ma césure au Japon, j’ai réalisé un petit jeu, seule, afin de me former moi-même, et j’ai pu beaucoup le valoriser lors de mon entretien !

Être passionné de jeu c’est bien, c’est d’ailleurs nécessaire en production et cela demande un énorme investissement : beaucoup d’heures sup... Mais il faut se lancer car l’on dit trop "tout le monde veut faire du jeu vidéo et personne n’y arrive". En fait, peu de personnes tentent vraiment l’aventure ! Lorsque l’on veut quelque chose, il faut se donner les moyens d’y arriver !

Il existe une association qui s’est montée au début de ma carrière professionnelle : Women In Game. Composée de professionnelles du jeu vidéo et d’étudiantes, elle propose aux jeunes femmes de les aider à améliorer leur CV, à s’entrainer à la prise de parole, à se constituer un réseau pour la recherche de stage. C’est un soutien important et je suis aujourd’hui investie dans cette association. Je participe notamment à des forums et tables rondes sur les femmes dans le monde du jeu vidéo et je prends beaucoup de plaisir à rencontrer d’autres femmes de cet univers.

Y a-t-il beaucoup de femmes dans ton équipe ?

Sur une équipe de 30, nous sommes 8 programmeurs et je suis la seule femme. Je dirais que dans ce milieu, nous sommes environ 15% de femmes et cela se ressent vraiment. Je connais 3 ou 4 autres programmeuses. Le fait que le jeu sur lequel je travaille se déroule dans un environnement militaire peut expliquer le manque de diversité, mais cela change doucement.

Comment cela se passe-t-il : être une femme dans cet environnement ?

Au début j’appréhendais un peu, j’entendais beaucoup de rumeurs. Mais j’ai eu la chance d’être intégrée à une équipe jeune et ouverte. Je suis arrivée à peu près en même temps que le phénomène #MeToo et je pense que cela a joué un peu sur le quotidien : moins de blagues... Je sais que certaines ont eu de vrais soucis mais j’ai eu la chance de passer entre les gouttes ! La profession évolue doucement vers un environnement plus sain, mais que si un problème venait à arriver, il ne faut surtout pas hésiter à aller chercher du support et de l'aide auprès de son équipe, les RH ou des associations.
 
*physique, chimie et sciences de l'ingénieur
Publié le  14 février 2020
Mis à jour le  14 février 2020